Entrevue

Économie sociale : une bonne note pour le CSSDM

Le Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM) accueille 106 713 élèves répartis dans 187 établissements scolaires. Voilà des chiffres qui démontrent l’ampleur du défi en matière de logistique ! Mathieu Bouchard, directeur adjoint du bureau des approvisionnements du CSSDM, et son équipe composée d’une trentaine de personnes continuent de faire leurs devoirs pour mettre de l’avant les entreprises d’économie sociale. 

« Le CSSDM est le plus important centre de services scolaire au Québec. Sur des dépenses annuelles de 1,4 milliard de dollars, les achats effectués auprès de nos fournisseurs et entrepreneurs totalisent entre 500 et 600 millions de dollars annuellement. Et au moins 70 % de cette somme est consacrée à des projets de construction et de rénovation », explique-t-il.

Le bureau des approvisionnements du CSSDM publie entre 150 et 200 appels d’offres par année. « Notre responsabilité est d’homologuer des produits et des fournisseurs par le biais d’appels d’offres ou la signature de contrats de gré à gré, selon les montants impliqués », dit M. Bouchard, en poste depuis un an à la CSSDM et qui possède plus de vingt années d’expérience en approvisionnement au sein de la fonction publique et dans le secteur privé.

Approvisionnement : une certaine autonomie pour les écoles

La Politique de gestion et d’attribution de contrats actuellement en vigueur a été révisée pour la dernière fois en mars 2016. « La nouvelle Politique de gestion contractuelle et d’approvisionnement responsable sera quant à elle probablement approuvée au conseil d’administration de septembre 2023 », dit-il. Facile de remarquer que la notion d’approvisionnement responsable bonifie l’appellation d’origine !

Il ne faut cependant pas oublier que le CSSDM est régi par la Loi sur les contrats des organismes publics. Donc, pour tout contrat supérieur à 121 200 $, l’organisation doit réaliser un appel d’offres. Dès que l’entente est supérieure à 75 000 $, elle procède par un appel d’offres sur invitation. C’est sous ce seuil qu’une certaine latitude se dégage et que des achats peuvent être effectués de façon décentralisée par les écoles.

« Sous un plafond de 10 000 $, les écoles peuvent signer des contrats de gré à gré. Si le contrat se situe plutôt entre 10 000 $ et 25 000 $, elles doivent s’assurer d’obtenir trois demandes de prix. Et entre 25 000 $ et 75 000 $, les achats se font en collaboration avec le bureau des approvisionnements », résume-t-il.

Économie sociale : 187 acteurs clés

Les établissements du CSSDM ont donc la possibilité de soutenir l’économie sociale et les entreprises de leur quartier, selon les règles d’approvisionnement mentionnées précédemment. Ils en sont des joueurs importants et ont désormais un meilleur outil pour tirer leur épingle du jeu.

Un sondage effectué à l’hiver 2022 auprès des dirigeants de ces établissements  a démontré qu’ils ne possédaient pas une connaissance suffisante des fournisseurs de l’économie sociale pour en soutenir la cause. « Quatre secteurs d’activités — l’alimentation, les arts et la culture, le tourisme et les sports, et l’environnement — ont été identifiés comme étant prioritaires à soutenir»

Mais le système informatique utilisé pour y déposer les contrats n’était pas optimisé pour les plus petits mandats, ceux qui sont souvent davantage à portée de main des entreprises d’économie sociale. « Il était plus difficile pour les requérants à l’interne de trouver un fournisseur de l’économie sociale codifié en ce sens », explique Mathieu Bouchard.

Le bureau de l’approvisionnement a donc décidé de créer des mots-clés et des contrats fictifs au système pour corriger cette lacune et renverser la tendance. « Le requérant effectue désormais sa recherche dans le système, tombe sur un contrat fictif et peut être redirigé vers la fiche de l’entreprise fournie dans le répertoire des fournisseurs du Conseil d’économie sociale de l’île de Montréal (CÉSIM) », souligne-t-il avec fierté.

Les écoles obtiennent ainsi le nom de fournisseurs de l’économie sociale à contacter. Le CSSDM a, par exemple, entériné des contrats de gré à gré avec Le Chic Resto Pop et Le Garde-Manger pour tous dans le cadre d’une mesure alimentaire visant à nourrir les élèves qui présentent des besoins, pour favoriser leur rendement scolaire.

Des indicateurs d’acquisition responsable à la rescousse

Depuis le mois de décembre 2022, les organismes publics québécois doivent inclure des considérations environnementales, sociales et économiques dans les appels d’offres publiés au système électronique d’appel d’offres (SEAO). « Vingt-et-un indicateurs d’acquisition responsable ont été développés en ce sens », explique Mathieu Bouchard.

Si la conformité à certains de ces 21 indicateurs est exigée dans l’appel d’offres, les fournisseurs souhaitant soumissionner doivent alors s’adapter. « Puisque ces organismes détiennent un pouvoir d’achat significatif, ils ont la capacité de faire évoluer les marchés en fonction de leurs exigences» Chose certaine, les marchés publics contribuent ainsi au développement d’une économie verte, prospère et socialement responsable. « Les appels d’offres sont une première porte pour tendre vers cet objectif. »

Et lorsque le soumissionnaire remporte le contrat, le donneur d’ordres doit inscrire au système si le fournisseur retenu est en mesure de se conformer aux exigences relatives aux indicateurs demandés. « Il n’y a pas de cible à comptabiliser pour le moment, mais ça pourrait être éventuellement le cas », suggère Mathieu Bouchard.

De l’espoir pour la suite des choses

Le CSSDM est signataire de l’initiative L’économie sociale : j’achète ! (ESJA) depuis 2013, soit avant la fusion des différentes commissions scolaires. « Nous souhaitons continuer de fournir notre part d’efforts en matière d’économie sociale et favoriser l’économie locale. Nous sommes d’avis que ça pourrait même entraîner un cycle : ces fournisseurs pourraient éventuellement embaucher les élèves du CSSDM », observe-t-il.

Et, à plus long terme, qu’entrevoit il pour l’économie sociale d’ici ? « Un jour, j’espère qu’on pourra dépasser la notion du plus bas prix conforme. On devrait envisager, en tant que société, “le plus bas prix conforme et le plus bas taux de GES possible ». Chose certaine, le CSSDM s’engage déjà en ce sens et mérite une étoile de plus à son bulletin.

Indicateurs d’acquisition responsable : un aperçu

Vingt-et-un indicateurs ont été établis afin d’identifier les acquisitions responsables dans le SEAO. En voici quelques exemples, par catégorie.

INDICATEURS ENVIRONNEMENTAUX

. Réduction des émissions de gaz à effet de serre
. Transport écoresponsable
. Certification biologique
. Réutilisable, recyclable ou valorisable

INDICATEURS SOCIAUX

. Limitation des effets négatifs sur la santé humaine
. Commerce équitable
. Inclusion ou accessibilité au bénéfice des personnes handicapées
. Entreprise d’économie sociale

INDICATEURS ÉCONOMIQUES

. Proximité territoriale
. Entreprise autochtone
. Innovation technologique
. Durée de vie supérieure

Source : Guide des indicateurs d’acquisition responsable, Bureau de coordination du développement durable du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC), 2022.

Version PDF de l’article

Pour lire ou relire les articles précédents dans le cadre de la série « Parlons économie sociale avec… »

> Hydro-Québec, bien branchée sur l’économie sociale

> Énergir, l’art de valoriser les entreprises d’économie sociale

> Économie sociale : la Ville de Montréal dicte la cadence

> Desjardins, fidèle à sa mission et ambassadeur de l’économie social

CESIM

Articles reliés: CESIM
Voir plus: Actualités
Voir plus: L’économie sociale : j’achète! (ESJA)